Association de médecins

medicaments.jpg     L’époque est au  regroupement de médecins au sein de grands cabinets collaboratifs.

On en attend  un modèle de fonctionnement optimal au bénéfice des patients, et pas seulement. On assure  que c’est mieux pour les médecins installés dans ce genre de structure.


S’associer, Ce n’est pas si simple pour autant.


Tout d’abord, qui milite pour ce nouveau modèle fonctionnel ?  Des regroupements prônés par des médecins exerçant seuls, ce serait un peu comme des lois routières édictées par un ministre des transports automobiles qui n’aurait pas le permis. 


S’associer, ce n’est pas si facile au quotidien. Je veux en parler un peu, ayant passé ces dernières années le permis association (nous sommes passés de 2 à 4).  Même une association réussie implique de nombreuses adaptations de la part des protagonistes. 


Pour passer avec succès le permis « association médicale », il est bon de ne pas oublier de prime abord quelques règles de code de route associative.


Une association est composée d’individus.


Et ces individus–n’ont pas la même vision de l’exercice –n’ont pas le même parcours –n’ont pas la même attitude vis-à-vis des  budgets –n’ont pas envie de travailler exactement de même manière –ont leur propres rapports humains  –sont d’âge et de génération différentes.


Associer différentes individualités, même lorsqu’il s’agit d’un choix, même lorsque c’est bien préparé en amont,  implique obligatoirement quelques renoncements et beaucoup d’adaptations. Ne jamais oublier qu’un associé est plus enchainant qu’un conjoint.  En effet, en cas de mésentente conjugale,  il est possible d’aller dormir à l’hôtel , voire de partir vivre ailleurs. En revanche, même si un associé vous insupporte, pas possible de claquer la porte de son outil de travail.

 

Donc il faut bien choisir son associé. Mais même en ayant bien choisi…


Il n’aura pas le même âge que vous. Donc moins  d’expérience, souvent pas assez au goût  du plus ancien. Dans les discussions, tandis que le plus âgé pensera inexpérience, le plus jeune pensera «  il me gonfle avec ses  souvenirs et sa morale ».


Il n’aura pas le même caractère que vous. Ne considérera pas avec le même regard la secrétaire plan-plan avec laquelle vous fonctionnez en vase clos depuis 10, 15, 20 ans. Cela peut déstabiliser  tout le monde, un jeune qui veut faire bouger les lignes d’antédiluviennes  habitudes.


Il n’aura pas la même clientèle que vous.  En fait, c’est à terme qu’ il n’aura pas la même clientèle.. Parce qu’au début, il aura « votre » clientèle…  ses malades seront d’une part des  nouveaux patients, mais aussi des patients que vous aviez l’habitude de suivre. Des nouveaux patients qui n’iront plus vers vous, des anciens qui vous laisseront tomber. Cette expérience peut constituer pour le plus ancien une sacrée  impression de perte, une faille dans un océan d’habitudes. Pas si facile à surmonter. Faisant jaillir un lot de question et frissonner des certitudes bien ancrées, comme celle de se sentir un peu indispensable. Pourquoi tel malade va-t-il voir mon nouvel associé ? Pur quelle raison tel médecin adresse t’il désormais une partie, voire tous ses patients, à votre nouvel associé.  Avant c’était vous !  de belles occasions de se remettre en cause, de surmonter cette impression inédite d’être un vieux ringard plus du tout indispensable.

 

Dans l’histoire, je suis le vieux (pas la plus âgée, la seconde sur la liste)… Enfin, vieille, non, juste dans ma seconde partie de carrière, mais pas encore en train de prendre ma retraite.  Notre dernière associée a 3 ans de plus que ma fille, Aïe ! Je voudrais que les jeunes du cabinet ne fassent pas trop de jeunisme, ne se disent pas que je suis has-been. Je me sens jeune encore dans ma tête, je ne sais si cela transparait, ou pas toujours.  Parfois bien sur,  je me laisse aller au vieillisme. Je tutoie tout le monde, du haut de ma cinquantaine bien mûre. Je pense qu’elles m’agacent, ces jeunes, à laisser le bureau en désordre, à ne rien organiser, à vouloir réviser des modèles de fonctionnement qui nous donnaient satisfaction depuis de longues années. Même si je ne m’émeus presque plus qu’un de mes patients m’abandonne pour une des jeunes, j’avoue que le pire c’est si un de mes correspondants appelle, tombe sur moi et me dit : tu me passes ton associée.. je voudrais lui demander de voir un patient !  


 J’aimerais bien lire  le point de vue de jeunes concernés par l’association avec un plus âgé qu’eux !  

 

 

 

Image Neil pour FlickR

2 commentaires sur “Association de médecins

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  1. J’ai eu la chance d’avoir un véritable « coup de coeur professionnel » et très rapidement, après quelques mois de remplacement le cabinet de groupe dans le lequel je remplaçais m’a proposé de m’installer. J’ai donc rejoint un groupe de 4 médecins, et à 28 ans j’étais la « petite dernière »! Mes deux confrères hommes les plus âgés (actuellement 60 et 55 ans) ont eu une attitude assez paternaliste bienveillante, toujours disposés à me conseiller tant sur les prises en charge médicales que sur l’aspect relationnel. A l’inverse, ils me demandent régulièrement mon avis sur pas mal de trucs car « toi tu sors de la fac, tu es au courant des dernières recommandations! »  Je suis devenue très proche de ma collègue femme de 50 ans car nous avons une manière daborder les choses assez similaire et finalement nous partageons de nombreux patients qui apprécient de nous voir l’une ou l’autre. Nous sommes amenées très souvent à suivre conjointement plusieurs patients, c’est très enrichissant. Et finalement c’est avec la plus jeune du groupe que j’ai developpé le moins de rapports tant professionnel que personnel (collègue qui depuis est partie, laissant place à une nouvelle collègue installée récemment) J’ai donc l’impression que nos rapports sont assez équilibrés, chacun pouvant partager sa propre expérience, chacun ayant sa place au sein du groupe. J’ai apprécié que mes collègues tiennent compte, à mon arrivée, de mes remarques sur certaines choses que je souhaitais voir évoluer, et nous avons fait un certains nombres de changements sur notre organisation, après discussion évidemment. Nous avons la chance d’avoir une vision globalement similaire de notre exercice, ce qui facilite vraiment les choses. Nous prenons le temps chaque jour ou presque de partager un café, ou simplement un moment de discussion. Nous faisons souvent des réunions informelles, autour d’un verre de champagne (ouuuh les nantis!) pour discuter des éventuels problèmes ou des décisions à prendre pour le groupe. Nous ne sommes pas toujours d’accord sur tout c’est pourquoi chaque décision fait l’objet d’une discussion commune. En tout cas j’aime vraiment cette manière de travailler, je sais que je peux compter sur eux, mais je sais aussi qu’ils me considèrent eux aussi comme un pilier de notre association. Je viens de fêter mes 4 ans d’installation et aucun regret sur mon choix!!

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    1. Merci de parler longuement de cette expérience réussie, Perruche . Cela va dans le sens de ce que j’ai écrit, montrant que toute démarche d’association nécessite de la part de tous des adapatations afin d’obtenir la satisfaction maximum et de travailler dans des conditions agréables.

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