Après un début de mois pépère, (normal en gastro, les vacances calment les maux de ventre), voici venue ce jour une consultation bien remuante
Mme C à qui j’ai découvert un cancer du colon en endoscopie la semaine passée. Il s’agit d’une coloscopie motivée par la réalisation d’un test de dépistage par hemoccult , recherchant un micro saignement dans les selles.
Heureusement pour la patiente, le bilan ne montre pas de ganglions, pas de métastases.
Consultation d’annonce
Direction le chirurgien
Mme A.
Le genre de malade impossible. Folle, pleureuse, l’anxieuse qui déballe tout sur le bureau, et en plus vraiment malade, car elle a une hépatite auto-immune.
On en est a la 4ème consult depuis mai. Elle ne veut pas faire les examens, notamment en juin puis en juillet elle m’a pris le chou parce qu’elle refusait de réaliser l’indispensable biopsie hépatique préalable au traitement. Elle m’avait tant pris la tête au cours de la dernière consult.. j’ai du lui intimer l’ordre de stopper ses chuintements, tant elle me bloquait le cerveau avec ses récriminations. Impossible de réfléchir sereinement dans de telles conditions sur son histoire négligée et compliquée.
Elle s’est enfin décidée à la faire la biopsie. En plein mois d’Aout. Sauf que cela n’a pas fonctionné comme imaginé. En fait, au scanner , il y avait une masse, et le radiologue a prélevé dans la masse. Et il a oublié de me le dire. Et le labo a oublié de m’avertir du résultat.
C’est donc juste au moment d’appeler la patiente dans la salle d’attente que je découvre le résultat.
J’attendais d’y lire le stade évolutif de l’hépatite.
Or, sur le compte rendu, il est noté : adénocarcinome…. Cancer, quoi …
Outre le choc que j’ai reçu, moi, en lisant cela…
Je vous laisse imaginer la suite de la consultation..
, mais un tel choc est il imaginable, même si comme madame A on le redoute, voire on attend depuis toujours la maladie grave…
Maintenant madame B, bien connue, mal au ventreuse chronique, qui jargonne 3 mots francolgériens pour redire une fois encore qu’elle a mal au ventre. Comme je ne comprends rien aux explications, elle fait rentrer son fils. Ah c’est vrai, j’avais oublié, il est simplet. Il comprend le français lui, mais pas les questions !
Mme Br, encore une patiente que je connais de longue date. Bien sur, nous les spécialistes, nous ne voyons les patients qu’assez épisodiquement, même si cela s’étale sur des années. En l’examinant, je plaisante. Alors, la vie, ça va, racontez moi un peu ! …
Ma fille s’est suicidée le 25 décembre dernier…
Aïe, mais c’est affreux ça, Mme Br..
Oui me dit Mme Br, parce que mon fils, il s’était suicidé aussi il y a quelques années.
Après ça, t’es calmée, t’oses plus poser de question
Finalement, arrive enfin la dernière patiente de cette consultation bien chargée.
J’ai saigné il y a 3 semaines et il y a 3 jours, dans les selles, m’indique t’elle.
A l’examen : il y a plein de sang, du sang pur dans les matières. Il y en a qui consultent au moindre gargouillement, mais d’autres ont la vigilance en berne, et l’anxiété sous le zéro… Mme Y a bien un saignement actif ; Une urgence, en pratique. La coloscopie à réaliser en urgence demain, la prise de sang, je ne sais même pas si elle a une anémie, la consultation en urgence avec l’anesthésiste, toutes les explications sur cette soudaine précipitation que la malade bien sur, ne comprend pas …
Enfin, bref, une journée active de la vie ordinaire d’un spécialiste libéral
Ceux que les hospitaliers appellent parfois d’un ton méprisant : les médecins de ville…
OUF! quel métier que le votre !! Cancer, sang , re-cancer, !…….. Est ce qu’un médecin parvient à prendre assez de distance pour ne pas se laisser » bouffer « par autant de bonnes nouvelles , jour après jour,mois après mois…
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c’est possible, c’est cela que l’on appelle « avoir du métier » peut-être. Bien sur on ramène des patients chez nous dans la tête. Mais combien d’autres se prennent la tête avec leur boulot. Evidemment ce sont les situations humaines qui sont les plus difficiles a encaisser. On est obligé d’apprendre a prendre une certaine distance. Apprendre qu’on est la pour aider les gens à gérer leurs souffrance et pas pour souffrir avec eux.
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Bonjour, je découvre ton blog et je m’amuse d’y découvrir les impressions à chaud, de celui qui ausculte et diagnostique. J’ai une autre version à te proposer sur mon blog, je ne relève pas de ta spécialité et mon récit a seulement pour but de partager une expérience tout en gardant le sourire, j’espère que tu apprécieras le moment que tu y passeras… Cordialement. anouch
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Ji’irai faire un tour , OK
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