Voici pour finir, 3 dernièrs curriculums. Finalement, j’en avais annoncé 9, mais un dixième est venu s’ajouter in extremis.
8- Les hospitalophiles : Pourquoi sont ils restés à l’hôpital ? Pour certains, l’exercice hospitalier est leur unique conception de la médecine. Pour d’autres, la peur de se lancer dans la vie libérale, et ses aléas, répercutés dans les médias. Pour d’autres encore, l’envie de prestige qu’ils pensent trouver dans la carrière. Parfois, seules des opportunités de poste attractif les ont fait rester, le hasard en quelque sorte. Les hospitalophiles ne sont finalement pas très différents des libéraux, même si on trouve nombre d’entre eux dans la catégorie prestigeophiles. On rencontre des hospitalophiles consultophiles et des consultophobes. L’intérêt d’être un consultophobe salarié étant de pouvoir se tourner facilement, sans risque financier, vers un autre mode d’activité. Logistique, organisationnel, CME, congrès, recherche, littérature médicale, médias, médecinophilie… Envers les médecins de la ville, les hospitalophiles se répartissent en 2 sous catégories : les libérauphiles, et les libérauphobes. Les uns admettent, voire disent comprendre, les difficultés de l’exercice de ville, tandis que les autres sont impitoyables envers leurs collègues libéraux, masse impalpable et inqualifiable des médecins du dehors bons à soigner des grippes et des gastroentérites.
9- Les tutellophiles : Les tutellophiles que l’on pourrait éventuellement nommer égophiles vont s’employer à trouver un statut qui les met à l’abri de la consultophilie, et de la médecinophilie. Pour nombre de leurs confrères, ils représentent un groupe de médecins plus centré sur une carrière indolore, non confrontée aux rugosités de l’exercice quotidien. Etre tutellophile est un challenge, dans lequel il faut assumer les critiques des pairs. Une partie non négligeable des tutellophiles ont commencé leur carrière par l’exercice médical de terrain, plus ou moins long, parfois même endeuillé d’un passage par la consultopathie. Le statut qui les rassure passe par un éloignement radical du stress médical des consultations. Pour autant, leurs pôles d’intérêts restent prioritairement médicaux. On les retrouve donc dans les instances et les tutelles, voire les ministères. Arrivés dans ces sphères un peu cotonneuses, éloignés des préoccupations quotidiennes de la consultation et des aléas de la vie médicale de terrain, ils peuvent en venir plus ou moins rapidement à sublimer leur passé de médecin praticien, à penser que tout était simple, à oublier qu’ils sont arrivés là au terme d’une consultopathie plus ou moins prolongée et sévère. Du soin, ils finissent par ne voir que les évènements indésirables. Le risque est fort après quelques années de se laisser glisser de la tutellophilie à la tutellopathie et de dénigrer systématiquement la profession. C’est une évolution redoutable du tutellophile trop éloigné du terrain et contaminé par les administratifs non médicaux.
10- les confuciusophiles: pour terminer sur une note de sagesse, il y a aussi des médecins qui pensent qu’aujourd’hui comme hier, il y a du bon et du moins bon. Certes les patients sont devenus des consommateurs de soins qui désirent un médecin disponible à toute heure, alors que le temps des généralistes dévoués 30 heures sur 24 est révolu. Mais la société s’adapte à ça. Et les médecins sont en passe de le faire, même si c’est parfois avec plus de souffrance que les vendeurs qui veulent travailler chez Akei le dimanche. Certes les patients exigent du soin et des traitements, mais on ne meurt plus de l’appendicite, ni de tuberculose, et même on guérit bon nombre de cancers. Certes il est dur d’être libéral, et comme la colonne des dépenses est souvent hypertrophique, et préoccupante, la seule manière de gagner plus est de travailler plus. En même temps, à la fin du mois, le revenu de la plupart des médecins est assez correct. Certes les tutelles sont omniprésentes, mais elles font plus de bruit et de peur que de mal réel. Certes, la contrainte est partout, dans les cabinets médicaux, dans les maisons médicales, dans les établissements, mais la période est à vivre dans un monde organisé, soumis au principe de précaution, et le contrôle est partout, pas seulement chez les médecins.
Les confuciusophiles préfèrent ne pas dramatiser. Leur plus gros handicap, bien sur, l’inertie. Leur sagesse est pesante pour ceux ayant un tempérament à se battre. Les médicophiles syndicalistes, s’irritent fort de ces confuciusophiles qui refusent de combattre, qui s’évertuent à être convaincus de leur capacité à passer entre les gouttes, en continuant de mener la vie médicale et même extramédicale qui leur convient. Les adeptes d’une certaine dose de sagesse continuent malgré tout d’estimer qu’aucun ouragan ne se produit vraiment, que les changements se font insensiblement dans une sorte d’inéluctabilité qu’ils ne pensent pas pouvoir enrayer. Les confuciusophiles connaitraient t’il le dicton de Confucius ? .. « tout s’arrange, même mal ».
En chaque médecin sommeille un peu de chacune des catégories des curriculums. Un trait de caractère prédominant, mais des zestes de tous les autres curriculum. On ne peut pas faire de ces individualités si composites un groupe homogène dit « les médecins » ou « le corps médical ». Avis à ceux qui pensent pouvoir gérer la médecine et les médecins comme si tous avaient une pensée et une manière de faire uniques.
Espérant vous avoir amusés
Mrn Lgn
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