Bien que pas comparables en matière d’activité et de rôle en santé, 2 professions totalement différentes, et qui occupent la scène médiatique, partagent certaines caractéristiques comme : un numérus clausus, et des tarifs réglementés. Il s’agit des taxis et des médecins. Il me semble intéressant d’en tirer quelques conclusions.
Le nombre des taxis est régulé (avec l’assentiment des taxis qui, en limitant la concurrence, voulaient valoriser le prix de la revente de licence). Cela a fait exploser les prix de licence. On rappelle qu’elle est au départ fournie gratuitement par l’administration, mais en nombre restreint. Le temps des couilles en or de la revente de licence subit des revers depuis l’ubérisation du transport. Mais des années de revente avec culbute financière l’ont précédée.
Le nombre de médecins est régulé depuis les années 70 (mais dans ce cas, c’est contre l’avis du corps médical). Cela a abouti, à l’inverse, 40 ans plus tard, à une dévalorisation de l’exercice médical. N’importe qui peut entrer dans n’importe quel taxi, tout comme n’importe quel patient peut aller consulter n’importe quel médecin. Mais au bout de sa carrière, le taxi est propriétaire d’une licence, le médecin n’a qu’à bosser. Il n’a rien à revendre.
Le tarif des taxis est réglementé, mais revalorisé chaque année. La revalorisation tient compte des charges, (carburants, frais de réparation et d’entretien automobiles, tarif des assurances et prix des véhicules). Chaque minute compte et est facturable. On ne dérange pas un taxi pour rien. Pour une toute petite course, ce n’est pas gratuit, il y a un tarif forfaitaire. S’il y a des personnes de plus, des bagages, c’est en sus. Il y a une revalorisation annuelle, 7 revalorisations en 7 ans. Les tarifs ont augmenté de 22.75% entre 2008 et 2015.
Le tarif des médecins est réglementé mais sa revalorisation est rare. La dernière augmentation du prix de la consultation de médecin généraliste date de 2011. La consultation est passée de 22 à 23 euros, soit une augmentation de 4,5%. Quelques additifs supplémentaires ont été ajoutés au prix des consultations, mais ils tiennent compte seulement de la typologie de la clientèle -âge et des maladies des patients (enfants et vieux de plus de 80 ans)- et du suivi de certaines recommandations par les médecins. Le critère charge n’entre jamais en compte dans le calcul de prix de la consultation. L’augmentation des charges n’est donc compensée que par une augmentation en volume du travail du médecin. Chez les médecins, il y a beaucoup de choses gratuites. L’appel téléphonique du médecin en pleine consultation est gratuit. S’il y a plusieurs problèmes à voir au cours d’une même consultation, elle aura le même prix. Que la consultation dure 5 minutes ou 30, elle est au même prix unique de 23 euros.
Normalement, ce qui est rare est cher. Quelle étape a donc manqué le corps médical pour que ça ne se passe pas comme ça ?.
Chez les taxis, ou ce concept « ce qui est rare est cher » a bien fonctionné durant des années, la déconvenue est issue du développement rapide et incontrôlé d’une concurrence imprévue sous forme de transports uberisés. Très vite, la licence onéreuse est devenue une action aussi dévalorisée qu’après le crach de 29. Malgré tout, les taxis ont un lobby, et sont en passe d’obtenir réparation, rachat au prix du neuf de ce bout de papier désormais presque sans valeur qu’est devenue leur licence.
Les médecins n’ont pas exploité le filon de la rareté. Contrairement au taxi qui ne peut aller plus vite d’un point à un autre, le médecin le peut. Le corps médical a donc revu son activité à la lumière de la demande de la clientèle. Les médecins ont organisé mieux leur temps, travaillé plus vite pour répondre à l’inflation de la demande. Ils se sont eux-mêmes ubérisés en quelque sorte. Accélération de la santé qu’on leur reproche en se plaignant à tout va qu’ils ne consacrent pas assez de temps à l’écoute des patients et ont des délais de consultation qui s’allongent. Forcément, ils ne peuvent pas travailler plus tout en gardant les mêmes disponibilités pour chacun. Forcément, ils ne peuvent pas non plus travailler en continu pour répondre à toutes les demandes.
Mylène Peyreton Autrey-les-Gray Taxi brousse
Les médecins ont donc tout faux
- La clientèle d’un médecin vaut moins qu’une licence de taxi. Elle ne vaut rien en réalité, n’a aucune valeur de revente. Le jour de leur retraite, les médecins n’arrivent même pas à trouver un repreneur gratuitement.
- L’activité médicale s’est d’elle même ubérisée, pour répondre à toutes les demandes, mais en même temps paupérisée. Travail à la chaîne, pauvreté de tarif, pauvreté de temps relationnel. Au final, personne n’est content, ni les médecins ni les patients.
- Si les médecins continuent à accepter cette situation, ils vont dans le mur. Un nombre de médecins en diminution, une activité en augmentation. A terme, ce n’est pas gérable. La même ou une plus grande charge de travail sur les épaules de moins de médecins. Des médecins débordés, aux tarifs non revalorisés, des patients exigeants, réclamant la santé, et de ne plus la payer.
Conclusion, nous vivons une époque de Bisounours, dans un pays ou les médecins sont rares et pas chers, et se voient reprocher d’être débordés et payants.
LA différence, c’est que les courses de taxi ne sont pas soumises au remboursement d’une assurance monopolistique qui sert de tirelire aux politiques.
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Outre le raccourci un peu rapide qui compare deux professions différentes sur leur seul aspect libéral, il manque un élément d’importance. Le nombre de médecins est certes contingenté, mais pas leur installation. Ce qui fait, ou plutôt faisait le prix de la licence de taxi est la limitation du nombre de taxis. La réduction du nombre de médecins s’est faite à » la source » mais tout médecin peut s’installer sans contrainte. Pourquoi payer une patientèle quand on peut au départ d’un médecin la « récupérer » par sa présence à proximité.
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C’est le cas maintenant, mais ce n’était pas ainsi il y a 30 ans. Tout comme les taxis maintenant, à force de préserver leur pré carré, les médecins ont fini par perdre la valeur de leur clientèle.
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Perdre tant d’années à étudier pour n’avoir aucune reconnaissance c
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