Mars est le mois consacré à parler de la prévention du cancer du colon… L’action est nommée « Mars Bleu »
Le test de dépistage par hémoccult, consiste simplement à faire la recherche de sang caché dans les selles. Nous, gastroentérologues, le recommandons, car il peut vous empêcher d’avoir un cancer du côlon… C’est un dépistage utile, pas controversé, reconnu comme facteur de prévention du cancer colique.
Partout on vous en parle. Mais comme l’idée d’aller patouilller dans son caca n’est pas souriante, je vais vous en expliquer plus, afin de motiver les plus de 50 ans (destinataires de ce dépistage), mais aussi les plus jeunes (pour qu’ils motivent leurs parents !)
1) C’est très simple à effectuer: plus besoin d’aller patouiller dans son caca
On convient que le test hémoccult n’a pas bonne presse, mais c’est à cause de l’ancien test. Ce n’est ni tentant ni glamour d’aller faire sa petite crotte sur un morceau de papier pour tremper ensuite un écouvillon dedans, puis poster le tout ! Cependant, le nouveau test mis en place depuis 2015 est beaucoup plus simple à effectuer (un seul prélèvement contre 6 avant), beaucoup plus sensible et spécifique
L’ancien test demandait plusieurs jours de recueil, plusieurs prélèvements, et c’était un repoussoir ! En revanche le nouveau test hémoccult, qui s’appelle en réalité OCSensor, est très simple à faire en une seule fois.
Dans le kit, il y a une sorte de feuille plastifiée qui se coince sous la lunette des toilettes, pour que le caca tombe dessus (attention : que le caca, pas le pipi)
Une fois que le caca a atterri, on prend le petit bâtonnet à prélèvement, on le trempe dans la matière, puis on le remet dans son tube. On rebouche, on remplit les papiers administratifs, et hop, on poste dans les 24 heures.
Simple, non !
2) Non seulement c’est plus simple, mais c’est bien plus performant.
On détermine l’intérêt d’un programme de dépistage par la sensibilité et la spécificité du test utilisé, et d’autre part par le taux de participation des personnes concernées et le délai entre 2 tests.
- Le pourcentage de personnes cibles qui réalisent le dépistage : concernant le nouveau test hémoccult, du fait de sa simplicité d’action, et de ses excellents résultats en nombre de polypes retirés, l’adhésion du corps médical est augmentée, et ainsi ils motivent plus l’adhésion de leurs patients. Le pourcentage de personnes dépistées augmente
- La sensibilité et la spécificité du test.
- Le test Hémoccult/OC Sensor est beaucoup plus sensible que le test précédent = cela veut dire qu’il détecte du sang en plus petite quantité
- On peut prédire actuellement que sur 100 personnes en bonne santé et sans symptôme digestif (critère de dépistage) réalisant un test hémoccult, ce test sera positif chez 6 d’entre elle (6% de positivité du test). Pour avoir 100 patients positifs, li faut avoir fait un test hémoccult à 1700 personnes)
- Il est également plus spécifique : alors que l’ancien test détectait le sang venant de vos dents, ou de la viande mangée la veille, le nouveau test est immunologique et ne détecte que du sang humain.
- Cela veut dire qu’un test positif a beaucoup de chances de cacher une lésion intestinale bénigne ou même maligne débutante (2 chances sur 3, soit 60% environ).
3) Puisque le test est plus performant, s’il revient positif, cela veut dire que j’ai un cancer ?
Un test positif veut dire que j’ai un cancer ? Non ! un test positif signifie seulement que du sang a été détecté dans vos selles et cela peut avoir plusieurs causes, en très large majorité non cancéreuses. Afin d’en identifier l’origine, vous devrez faire réaliser une coloscopie. C’est la visualisation interne du colon lors de la coloscopie qui permet d’identifier la cause du saignement
Pour simplifier votre vision du résultat
On a dépisté 1700 personnes
1600 ont un test hémoccult négatif, ils devront refaire le test 2 ans plus tard
100 personnes ont un test positif. Ils font alors une coloscopie, et voila ce que l’on peut leur trouver :
- 60 ont adénome (polype) bénin ou cancéreux ; la répartition c’est
- 30 ont un gros adénome de plus de 1 cm (sachant que le risque de se transformer en cancer est d’autant plus important que les polypes sont de grande taille.)
- Environ 5 à 6 de ces 30 personnes ont un polype en état précancéreux. Cela veut dire que les polypes ont déjà commencé à modifier leurs cellules, ce que l’on nomme en histologie des adénomes en dysplasie de haut grade (DHG)
- Environ 9 des 60 personnes a déjà un cancer du colon. Pour la majorité de ces 9 patients, c’est un cancer détecté à un stade précoce, il peut être guéri totalement dans 90% des cas.
- D’un autre coté, 40 patients sont totalement rassurés, ils ont une coloscopie normale ou des choses bénignes comme de banals diverticules qui ne sont pas à risque de cancer. Ce sont des personnes ayant eu un faux positif, du sang qui venait d’on ne sait pas ou, mais pas d’une lésion intestinale
4)Pourquoi certains doivent t’ils faire ce test et d’autres une coloscopie sans test préalable ?
Parce que le principe du dépistage est de cibler uniquement des gens en bonne santé et n’ayant à priori aucun facteur de risque d’avoir une maladie.
Si vous êtes dans ce groupe de gens, vous pensez surement : « Personne dans ma famille n’a eu ce cancer, je ne vois pas pourquoi je l’aurais »
Vous verrez dans le cadre ci-dessous que 94% des cancers du côlon et rectum surviennent chez des gens sans aucun facteur de risque familial, ces personnes justement ciblées par le test hémoccult… donc vous ! (pas moi, je suis dans un groupe à risque..)
En matière de cancer colique, on définit des groupes de risque. Selon leur risque, les personnes sont orientées soit vers un test hémoccult, soit directement une coloscopie de dépistage.
Les différents groupes à risque de cancer du colon/rectum sont les suivants
Rappel des groupes à risque de cancer colo-rectal
* Risque faible : => hemoccult
– plus de 50 ans sans symptômes apparents et sans antécédent familial : 94% des cancers colorectaux surviennent dans ce groupe
* Risque élevé => coloscopie
– antécédent personnel d’un adénome de plus d’un centimètre ou un premier cancer colorectal
– 1 antécédent familial de premier degré (père, mère, frère, soeur, enfant) avant 65 ans, ou 2 antécédents de premier degré quel que soit l’âge du diagnostic
– maladie inflammatoire chronique de l’intestin étendue évoluant depuis plus de 20 ans.* risque très élevé => coloscopie précoce + consultation d’oncogénétique
– Les membres d’une famille atteinte de Polypose Adénomateuse Familiale (PAF) caractérisée par la présence de très nombreux polypes sur le tube digestif.
– Les membres d’une famille avec HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer), également appelé syndrome de Lynch.
4) Je mange équilibré, cela me protège du cancer du colon !
Vous faites tout pour ne pas avoir un cancer du côlon. Manger des fibres, des vitamines, pas trop gras, manger sainement. Vous suivez les recommandations diététiques glanées au fil de vos lectures.
On pense que c’est protecteur de bien s’alimenter, mais cela n’a jamais empêché personne de faire partie des 43 000 nouveaux cas annuels puis, s’il est pris en charge tardivement, des 18 000 décès de cette maladie par an.
Certes l’alimentation joue surement son rôle. Mais comme on ne sait pas au juste lequel et comme le cancer du côlon, lui, il se moque de vos fibres et de vos efforts pour ne pas l’attraper, il vaut mieux trouver un autre moyen que ce qui est dans votre assiette. Ce moyen c’est le dépistage par test hemoccult.
Car ce cancer-la, quand même, il vous fait un vrai cadeau : il n’apparait pas de novo dans votre colon. Il a toujours été précédé par un polype, bénin, qui a pris son temps pour devenir un cancer : il suffit d’arriver avant que le polype ne se soit transformé et de l’enlever ! et hop le tour est joué, la personne est protégée du cancer (à 97%, car 100% n’existe jamais en médecine).
Donc, mangez sainement, mais ne vous en contentez pas.
Vous voulez tout mettre en oeuvre pour éviter le cancer
Du colon,
C’est le test hemoccult qu’il faut faire !
Et la vous serez bons !
Le cancer du côlon et du rectum est donc un cancer sur lequel votre détermination peut avoir une influence. Vous, bien-portant qui ne vous plaignez absolument d’aucun trouble digestif, il vous suffit de faire un test hemoccult de dépistage pour que l’on puisse vous protéger contre ce risque, en vous enlevant un polype que jamais vous n’auriez pensé avoir.
- Alors, convaincus ? eh bien, faites la démarche !
50 ans et plus ? On vous attend dans nos bureaux. Votre médecin généraliste, mais aussi votre gastroentérologue peuvent vous remettre le test. Vous pouvez également contacter le centre de dépistage du cancer de votre département et ils vous l’envoient chez vous.
Faites la démarche en mars, parce que nous vous y faisons penser, mais pas seulement. Printemps, été, automne, hiver, chacun sa période de bonne résolution !
Moins de 50 ans, n’oubliez pas d’en parler à vos parents !
Dr Marion Lagneau
Gastroentérologue
Bonjour, moi j’ai passer une coloscopie , au mois de janvier 2018, les résultats sont pas sûr, car je dois en repasser une autre début avril, a l’endroit ou il y avait unpolype dans le colon droit de plus de 1 cm, avec un pied et le gastro veut faire un autre prélèvement à cet endroit vu les résultats reçu !!! ,je suis pas rassuré ,j’ai 58 ans Merci
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Les chiffres détaillés sont clairs mais incomplets. On ne peut proposer un dépistage sans aborder d’une part le surdiagnostic, d’autre part les risques spécifiques de la procédure.
Le surdiagnostic concerne les traitement administrés dans des situations où l’évolution naturelle aurait été la guérison, ou au moins l’absence de complication. Pour reprendre les chiffres de l’exemple
1700 personnes dépistées
100 hémocult positif
30 polypes de 1cm
30 polypes > 1cm
Sur les 30 polypes de 1cm peu risquent de se transformer en cancer ( chiffre mal connu certains avancent 2%)
Sur les 30 polypes > 1cm , 3 deviendront un cancer ( 10 si le polype > 2cm)
Le temps de transformation est estimé à 10 ans ( mais très mal connu)
Les risques inhérents à la procédure sont ceux de la coloscopie
les risques anesthésiques sont très rares
Le risque de perforation est de 1/1000 (coloscopie sans résection de polype) à 2/1000 ( si résection de polype) le risque hémorragique est de 5% ( en cas de résection de polype)
Sur la base des chiffres de l’exemple
Moins de 1 patient / les 100 qui ont une coloscopie risque une perforation
3 patients / 60 qui ont une résection de polype auront une hémorragie
Au total
100 coloscopies
60 polypes
3 évolution en cancer en absence de dépistage
3 hémorragies de résection de polype
Ces chiffres n’empêchent pas le dépistage, mais le choix du patient d’y participer ou non implique une information exhaustive.
Enfin le plus important Le dépistage du cancer colorectal ne réduit pas la mortalité, mais réduit les complications liés au cancer
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