Arrêtons nous un moment sur quelques considérations un peu, mais très peu scientifiques qui vont donner des arguments de réflexion sur l’action de la chloroquine, et donc le probable élargissement imminent de sa prescription (selon moi, mais cela n’engage que moi, et c’est juste si on ne trouve pas mieux)
La base de la réflexion est de la physiopathologie simple. Il existe de réels arguments pour des éléments en faveur d’une réaction inflammatoire exacerbée et/ou de phénomènes d’auto-immunité dans les infections à Coronavirus
1) La réaction inflammatoire exacerbée, c’est que les scientifiques appellent l’orage cytokinique.
Explication simple de l’orage cytokinique
Le corps humain attaqué par un organisme étranger infectant met en place des mécanismes de défenses pour se débarrasser de l’intrus.
Pour éliminer l’indésirable, bactérie, ou virus, il se produit une réaction inflammatoire, par activation de certaines cellules du sang et de la moëlle, les lymphocytes dont il existe plusieurs sortes, en gros les B et les T. Ceux-ci fabriquent alors en quantité et excrètent de nombreux composés chimiques destructeurs de l’agent étranger. Parmi ces molécules : les cytokines.
Ce qui se produit en cas d’évolution grave de l’infection à Coronavirus, c’est que cette réaction inflammatoire semble exacerbée. Les lymphocytes inondent le corps de cytokines, ce qu’on appelle l’orage cytokinique. Malheureusement, les cytokines ne ciblent pas que sur le virus pour le détruire. Plus largement, leur mission étant la destruction, elles peuvent opter pour la destruction du corps qui abrite les virus (certitude biologique = tuer l’hôte implique de tuer le virus). Les cytokines détruisent alors les poumons, les reins, le pancréas, le cœur, etc… D’ou les formes graves nécessitant la réanimation.
En gros, finalement, ce qui tue les patients, ce n’est pas le virus lui-même, c’est la réaction inadaptée de l’hôte pour s’en débarrasser.
2) L’auto-immunité déclenchée par l’infection se fait jour petit à petit. Notamment avec la constatation de plus en plus fréquente de lésions cutanées des doigts et des orteils, à type de gonflement, de noircissement, qui ont un aspect d’engelures. Or ce type de lésion est caractéristiquement rencontré lors d’une pathologie auto-immune : le lupus. Cette manifestation clinique très particulière apporte un argument pour une part de réaction auto-immune du patient infecté par le Coronavirus. Et surtout, un lien: le traitement de certaines formes de lupus repose sur … l’hydroxycholoroquine
A noter que c’est l’immense communication et l’échange de savoir constant entre les médecins français dans cette épidémie qui leur a permis de faire le lien entre cette manifestation cutanée et l’infection COVID, et ceci alors que rien n’avait été signalé en Chine
De ces constatations physio-pathologiques observationnelles on va sauter à la chloroquine.
Un truc est clair pour la majorité des médecins (nous en discutons beaucoup). Ce médicament a « certainement » une « certaine efficacité ». Ne serait-ce que parce que le Pr Raoult, tout critiqué qu’il est, tout particulier qu’il est, n’est pas un gourou mais un scientifique et qu’il a forcément des arguments. En revanche, nous sommes nombreux à penser qu’il a eu tort de balancer l’info sans qu’on ait eu le temps d’en savoir plus parce qu’il a fichu un vrai bordel.
Donc, probablement que ça marche. Mais le sensationnel de l’annonce du Pr marseillais n’a pas laissé le temps de savoir ni comment ni pour quels patients exactement. Donc, on ne sait pas si ça marche en tout début d’infection, si ça empêche l’évolution vers une forme grave, ce qui serait en réalité le vrai bénéfice attendu de ce médicament: qu’il empêche les gens de mourir. En contrant l’orage cytokinique et la réaction immunitaire.
Revenons vers ce que l’on sait, sur l’hydroxychloroquine. Elle est largement utilisée pour les maladies auto-immunes telles que le lupus érythémateux disséminé et la polyarthrite rhumatoïde. Pour résumer un article scientifique de 2018 (Clin Immunol. 2018 Oct;195:1-7.) l’hydroxychloroquine supprime de façon marquée les fonctions des lymphocytes B humaines médiées par TLR9 pendant les processus inflammatoires. Les auteurs indiquent que l’hydroxychloroquine peut être bénéfique dans le traitement des maladies auto-immunes à médiation par les lymphocytes B.
Plusieurs autres articles sont publiés et depuis longtemps sur l’effet immuno-modulateur des anti-paludéens comme la choloroquine. Justement, un article de 2012: Clin Rev Allergy Immunol. 2012 Apr;42(2):145-53
Il apparaît donc comme vraisemblable qu’un médicament ayant une action sur l’auto-immunité offre possiblement un moyen de limiter les symptômes et la progression des lésions tissulaires dans certaines infections à Coronavirus. Cependant le vrai intérêt d’un tel médicament n’est pas tant de diminuer le portage viral de ceux qui ont une forme bénigne. Ce serait mieux, objectivement, qu’il permette d’empêcher les gens d’en mourir, de faire des formes graves les conduisant en réa. Et c’est peut-être le cas : En ce sens, les chinois viennent de faire une prépublication à ce sujet : Efficacy of hydroxychloroquine in patients with COVID-19: results of a randomized clinical trial
Zhaowei Chen, View ORCID ProfileJijia Hu, Zongwei Zhang, Shan Jiang, Shoumeng Han, Dandan Yan, Ruhong Zhuang, Ben Hu, View ORCID ProfileZhan Zhang
doi: https://doi.org/10.1101/2020.03.22.20040758
This article is a preprint and has not been peer-reviewed [what does this mean?]. It reports new medical research that has yet to be evaluated and so should not be used to guide clinical practice.
Le souci, c’est qu’un scientifique renommé mais qui voulait faire du sensationnel a parlé trop vite et trop tôt. On ne sait pas si on doit le prescrire vraiment, mais surtout ce que l’on n’a pas eu le temps de savoir c’est à quels patients, à quel moment de l’infection, comment on l’administre, combien de temps, et pour quel bénéfice en matière à la fois individuelle et de santé publique.
Et donc, tous les médecins, on attend impatiemment d’en savoir plus, sur l’hydroxychloroquine, et sur les autres possibilités éventuelles de répondre à 2 objectifs : éviter les évolutions gravissimes de la maladie, et trouver une solution préventive ou thérapeutique pour que la vie puisse reprendre normalement.
Nous sommes impatients, autant que les patients, mais contraints de faire avec les informations scientifiques et les obligations légales. C’est pourquoi il ne faut ni nous menacer ni nous insulter quand nous ne prescrivons pas cela à ce jour, en l’état des connaissances et des autorisations.
Deux choses
> in vitro ça fonctionne très bien sur le virus du Chinkungunya, in vivo ça aggrave les gens
> l’étude que tu cites est tellement percluse de biais qu’elle ne veut rien dire
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donc je me fais avoir comme les autres par les études biaisées que je ne lis pas en entier… merde alors
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Et nous, les malades auxquels on demande d’être des patients acteurs dans le traitement de leurs maladies, nous faisons quoi dans cet immense foutoir ? Que valent nos intentions et nos souhaits ? Comment vous faire confiance si vous n’êtes pas fichus d’être d’accord entre vous ?
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Je partage l’avis de Mon confrère Zores et pourtant dans le fond je ne
suis pas d’accords, Quand nous avons le temps la question est : qu’elle est la probabilité que tel traitement soit efficace , dans l’urgence avec des décès, la question est l’inverse qu’elle la probabilité que le traitement ne soit pas efficace. Pour exemple, sommes nous sûr que le paracetamol n’aggrave pas les Covids ? moi j’ai pas étude en double aveugle (et le paracetamol ça tue aussi en surdosage) . Dés lors , il existe un certain nombres d’arguments et de données pour tenter la thérapeutique mais , il faut qu’elle soit très encadrée. Et il faut arrêter de nous prendre pour des idiots, on ne va pas prescrire de la chloroquine et de l’azithromycine avec des patients sous cordarone , neuroleptique antidépresseur tricyclique ou inf. cardiaque etc. Une telle démarche n’interdit en rien les études pour confirmer ou infirmer l’hypothèse
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D’ailleurs des études démarrent en ce sens, en particulier chez des patients peu graves, l’idée étant qu’ils restent peu graves, et aussi parce qu’on n’a pas mieux pour le moment
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