Lettre ouverte aux prescripteurs larga manu d’IPP

De l’antre sombre de l’abdomen de bon nombre de vos patients, chers confrères non gastroentérologues, un mal profondément  tapi , sournois,  s’exprime sous des symptômes aussi variés que possible.  Des brulures, un reflux, une gêne épigastrique, l’impression d’avoir trop mangé,  un ballonnement à la fin du repas.  Quand ce ne sont pas des nausées, une envie de vomir, la gorge qui gratte, le poumon qui tousse.

 

bien entendu., j’évoque là le cas de sujets jeunes, sans symptome d’alarme qui évoquerait une pathologie maligne.


L’interrogatoire diagnostiquerait plus facilement le reflux si vous étiez plus nombreux à savoir que les  les reflux ne génèrent des brulures rétrosternales  que dans la moitié des cas. L’autre symptôme du reflux, ce sont les douleurs  épigastriques chez   50% des patients.


Il se trouve que l’arme du soulagement est à votre portée, en vente dans toutes les bonnes pharmacies. Une petite lampée d’IPP et hop, la brulure se calmera dans les quelques jours.


Pour une fois qu’il vous est possible d’être magicien,  peu d’entre vous s’en privent.  Embarquement pour une prescription d’IPP immédiate.  En parallèle, une tirade sur les menaces venant d’une une bestiole tapie dans le fond de l’estomac de vos patients, ce diable d’ hélicobacter pylori, petite bête susceptible de les grignoter de l’intérieur, dont   vous brandissez le sceptre  pour les convaincre d’aller voir un gastro. Vous connaissez les bons arguments d’envoi au spécialiste !  L’envie de connaitre  la raison de leurs brulures épigastriques, l’idée d’une bactérie tueuse de cellules gastriques, les amène efficacement  en consult de gastro.


Hélas, le temps que le patient se décide à prendre le rendez-vous, obtienne le rendez-vous de consultation puis de fibroscopie gastrique, l’IPP  a distillé son miel guérisseur. Quand l’endoscopie est pratiquée, il n’y a pratiquement plus de chance de trouver une lésion ulcérée, aussi bien gastrique qu’oesophagienne. En plus, mais ça vous ne le savez pas non plus, la prise d’IPP négative faussement la recherche d’helicobacter pylori…


Le résultat qui vous sera rendu sera alors aléatoirement réparti entre :

1- un estomac normal, et la présence d’helicobacter pylori. On ne pourra jamais dire s’il y avait un ulcère au départ. De toutes manières, la bactérie sera traitée.

2- un estomac normal, et l’absence d’helicobacter pylori.  On ne saura pas s’il s’agit d’un faux négatif, et il faudra souvent confirmer cette négativité par la réalisation d’une sérologie. Inutile de réaliser un test respiratoire, la négativité est de règle sous traitement IPP.

3- un oesophage normal, et on ne saura jamais s’il y avait une oesophagite au départ.


En plus,  tout ces dérangements laissent de côté les étiologies dominantes des symptomes épigastriques , à savoir : le reflux simple, et les troubles fonctionnels intestinaux. Ces 2 pathologies  se traitent de manière symptomatique et ne nécessiteront une fibroscopie gastrique chez les patients de moins de 50 ans, que dans certaines situations bien définies 


Je vous implore, médecins non gastroentérologues… Si vous demandez une fibroscopie gastrique à un patient, ne le mettez pas sous IPP avant.   Diagnostic ou soulagement, pas possible tout en même temps. Si vous optez pour la version soulagement, n’espérez pas que l’on saura vous donner le diagnostic après … quand les lésions auront cicatrisé.

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