Troisième chapitre du post consacré aux homéopathes.
III- Nombre d’homéopathes en France, activité exclusive ou non
La caisse nationale d’assurance maladie distingue les MEP (médecins à exercice particulier) des généralistes. Cependant, tous les généralistes ne déclarent pas leur activité MEP a la caisse, ce n’est pas obligatoire. Et cela rend difficile l’appréciation du nombre de médecins pratiquant l’homéopathie.
2008 : l’Assurance maladie recense environ 7 300 MEP, soit près de 12% des omnipraticiens libéraux, dont 1 730 acupuncteurs et 1 680 homéopathes. lien
2011 : La cour des comptes dans le rapport sécurité sociale 2011 se soucie de l’augmentation du nombre de MEP, dans un contexte ou la baisse du nombre de généralistes fait qu’ils « sont ainsi devenus minoritaires alors qu’ils font l’objet d’attentes particulièrement fortes pour l’optimisation du parcours de soins. Une des raisons est le développement, au sein des omnipraticiens, des modes d’exercice particulier (MEP) comme l’homéopathie, l’acupuncture, la médecine du sport etc., à la place de la médecine générale. Les MEP permettent notamment de demander une exemption à la participation à la permanence des soins (PDS) – ( NDLR : c’est écrit dans le rapport)» Quelques chiffres à l’appui: « parmi les 61 300 omnipraticiens libéraux recensés par la CNAMTS, seuls 53 700, qui représentent 46 % du total des médecins libéraux, sont effectivement généralistes » c’est-à-dire en mesure de se consacrer entièrement à la médecine de premier recours. Il suffit de calculer d’après le tableau, qu’il y a 7663 MEP soit 12,5% de MEP parmi les omnipraticiens.
Et ils ajoutent : « cette évolution en faveur des MEP continue de se renforcer parmi les omnipraticiens libéraux : les effectifs de MEP ont crû de 17 % entre 2000 et 2009 tandis que ceux des généralistes ont légèrement diminué (-1 %) ». Rapport de la cour des comptes 2011 rapport
2014 : dans son atlas de la démographie médicale, cette année-la, c’est le CNOM qui fait un zoom sur les MEP (médecin ayant une formation complémentaire, en plus de la médecine générale). On continue de voir les chiffres augmenter, en effet, d’après cette étude, les MEP correspondent à 25% de l’ensemble des médecins généralistes.
Afin de réaliser cet état des lieux, le CO a sélectionné les médecins généralistes inscrits au tableau de l’Ordre en activité régulière qui ont déclaré une formation supplémentaire à leur conseil départemental. Cette déclaration reste facultative auprès du conseil de l’Ordre des médecins.
Les chiffres sont les suivants : Parmi les 90 630 médecins généralistes inscrits au tableau de l’Ordre en activité régulière, nous recensons 22 985 médecins généralistes qui ont déclaré, à leur conseil départemental, une formation complémentaire ; soit 25,4% d’entre eux. Selon les régions, les proportions peuvent varier : allant de 13% de médecins généralistes à exercice particulier en Corse à 34% dans la région du Limousin.
2016 : Comme souvent dans la vraie vie, le mieux pour ne pas parler des problèmes est tout simplement d’oublier d’en parler.
Cette fois, 2 ans plus tard, donc le même document du conseil de l’ordre recense 88 886 médecins généralistes en activité régulière « tous modes d’exercice confondus ». Les mots MEP, exercice particulier, homéopathie, ne figurent pas une seule fois dans les 326 pages du compte rendu de 2016. On regroupe maintenant tous les généralistes sous une dénomination « médecins généralistes en activité régulière (tous modes d’exercice) »
Pour trouver une estimation du nombre de MEP en 2016, il faut aller sur le site du SML, Remède.org. Il y est indiqué que « 7000 MEP environ sont déclarés à la CNAM. Mais qu’il faut ajouter à ce chiffres tous les médecins généralistes qui ont une expertise particulière, par exemple tous ceux qui prescrivent de l’homéopathie mais ne se déclarent pas homéopathes. Et également certains spécialistes ayant un exercice particulier, comme par exemple les pédiatres homéopathes. Au total, au SML, nous estimons le nombre de MEP entre 15 000 et 20 000», souligne le Dr Bertin-Belot, secrétaire générale MEP du Syndicat des Médecins Libéraux et médecin homéopathe ».
Toujours d’après ce même site, les spécialisations les plus choisies : 23% en médecine vasculaire, 20% l’homéopathie, et 19% l’acupuncture. lien
2018 : le rapport bisannuel du conseil de l’ordre est plus court, seulement 165 pages. Encore une fois, on ne parle ni de MEP, ni d’exercice particulier, ni homéopathie ou autre médecine alternative. On continue le recensement à la baisse des généralistes, avec maintenant 87 801 médecins généralistes en activité régulière (tous modes d’exercice) ;
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Une chose est certaine au vu des chiffres. L’exercice particulier de la médecine est en développement. Pourquoi ? parce qu’il y a une demande ? parce que la demande crée l’offre ? parce que les médecins ont envie d’une vie plus simple que celle de l’omnipraticien de terrain au service des patients ?
Le fait que l’exercice particulier de la médecine soit en constante augmentation est-elle un problème ? En fait, il semble que oui…. Du point de vue santé publique, l’inflation de médecins en exercice particulier est bien un problème. En effet, ces praticiens ont fait un choix d’une médecine différente, et de ce fait, ils n’exercent pas exactement comme les médecins généralistes non homéopathes. En tous cas ceux qui sont en activité MEP exclusive. Et comme on manque désormais de généralistes, le problème devient plus criant. La solution consistant à ne pas en parler (cf + haut rapports du conseil de l’ordre 2016 et 2018) ne résoudra pas la crise démographique.
On est d’accord que bon nombre de MEP et d’homéopathes n’exercent pas de façon exclusive cette activité et peuvent ainsi être aussi spécialistes en médecine générale, mais une fraction notable de MEP est bien hors du champ de la médecine générale classique, disons. Voyons maintenant comment exercent les homéopathes, ce qui permet de comprendre les raisons pour lesquelles les homéopathes et autres MEP créent une lacune dans l’offre de soins en médecine générale. Ce qui est un problème sociétal, donc.
IV- Mode d’exercice des homéopathes
Commençons par les raisons du choix de la médecine à exercice particulier
Pourquoi certains MG choisissent d’être homéopathes (on peut s’interroger sur les raisons de leur déception de l’allopathie (je hais ce mot..), qu’ils ont apprise durant leurs nombreuses années de formation).
Une thèse en Lorraine a questionné la motivation des médecins à faire de l’homéopathie. thèse homéopathie
Les entretiens de cette étude ont fait émerger des idées propres à chaque médecin interrogé, qui sont le reflet de leur propre vision de la médecine.
En résumé, la dimension de la parole, de la présence à l’autre, et de l’écoute apparait comme un élément primordial de la relation de soins pour les médecins pratiquant l’homéopathie. Elle dépasse la seule application de techniques.
On note chez certains médecins une dimension philosophique à cette forme d’exercice. ils voient en la consultation et leur essai de compréhension de la souffrance de l’individu, un moyen de découvrir ou de développer le sens de leur propre vie. Ce sont les théories de beaucoup d’homéopathes, la maladie comme résultante d’un conflit spirituel et métaphysique.
Cette dimension de la parole et de l’écoute, ont le sait, a des effets thérapeutiques. Et c’est cette partie de l’homéopathie, celle de la relation soignant-soigné, et non le traitement homéopathique lui-même, qui est de plus en plus souvent mise en avant (en tous cas par les esprits scientifiques), pour expliquer l’effet positif de cette discipline.
NDLR : Moi cette explication m’ennuie un peu, je l’avoue. Parce que les MEP ne détiennent pas le monopole de l’écoute ni de l’attention au patient. Bien entendu que certains médecins ne sont pas de fins psychologues, pas à l’écoute. Mais la majorité des médecins, et en particulier des généralistes apporte à ses patients une attention qui ne nécessite pas le recours à un exercice médical thérapeutique différent.
Comment les MEP se considèrent t’ils eux-mêmes : comme des généralistes ou non?
Les réponses de ce chapitre 2 et du suivant sont issues en large partie de l’étude d’un panel de médecins en pays de la Loire en 2012. panel pays de Loire
Parmi les médecins qui pratiquent l’homéopathie près de la moitié (46 %) se considèrent comme généralistes, médecins de premier recours, au sein du système de soins primaires, faisant partie intégrante du système sans particularité aucune.
A l’opposé : 25% des médecins qui pratiquent l’homéopathie se considèrent spécialistes en homéopathie. Ils ont un exercice en homéopathie quasiment exclusif. Ils s’éloignent ainsi du concept classique de la médecine générale.
Si le conseil de l’ordre évite le sujet, les syndicats s’en émeuvent. L’un des présidents de syndicat, s’inquiète à cet égard de la mise en œuvre de la loi de santé 2022. « Un médecin homéopathe n’est pas un médecin de quartier, ni même de canton, ses patients viennent souvent de loin », relève-t-il, souhaitant que cette réalité territoriale soit prise en compte lors du déploiement de la loi.
Mode d’exercice des homéopathes : quelles différences entre généraliste « classique » et homéopathe ?
Pour approcher ces différences, appuyons nous sur un rapport de un rapport de l’UNCAM de 2016. La caisse a présenté une photographie des 6 771 médecins à expertise particulière identifiés déclarés comme tels en 2015, dont 4 508 exerçant en secteur I (65 %).
L’homéopathie apparaissait tout d’abord comme l’orientation la plus fréquemment exercée, en complément ou association avec une autre. L’enquête montrait, par ailleurs, que de très nombreux médecins associent plusieurs de ces orientations, un sur deux ayant des pratiques mixtes. Enfin, selon l’orientation, les pratiques systématiques sont plus ou moins répandues. 39 % des médecins qui exercent l’homéopathie déclaraient l’exercer de manière systématique, contre 28 % pour l’acupuncture et 19 % pour l’ostéopathie.
- Question volume d’activité, Les MEP voient moins de patients par jour : les durées de consultation étant plus longues. l’activité de consultation des MEP est plus faible (moins de 2 000 par an, contre 3 500 pour un généraliste dans la région IDF en moyenne)
- Les MEP travaillent le plus souvent sur rendez-vous.
- Les MEP effectuent peu de visites au domicile des patients : seulement un tiers d’entre eux en a réalisé au moins une dans la journée contre les deux tiers des médecins généralistes.
- En revanche, ils effectuent autant d’actes en urgence. Le nombre d’actes d’urgence (ayant nécessité une prise en charge dans l’heure) que les médecins ont eu à effectuer au cours de leur journée est similaire chez les médecins enquêtés et les généralistes du Panel : près d’un médecin sur quatre en a réalisé au moins un lors de sa journée de travail.
- La participation des MEP aux gardes est moins élevée que celle des 1 MEP sur 2 contre 2MG sur 3 . A noter une différence importante selon le secteur conventionnel. Plus de la moitié des médecins (54 %) effectuent des gardes parmi ceux travaillant en secteur I, contre seulement 23 % des médecins de secteur II. De même, les médecins installés en secteur rural sont plus souvent impliqués dans le système de garde que ceux installés en zone urbaine (67,6 % vs 23,7 %), comme pour les autres médecins généralistes.
- Enfin, les MEP sont moins choisis comme médecin traitant que les généralistes exclusifs 823 patients « médecin traitant » par praticien et 546 pour les homéopathes.
La question des gardes et de la permanence de soins par les MEP.
Les gardes de généralistes, certains MEP ne voudraient en effet plus en assurer, ou comme les allergologues ou les angéiologues, ne seraient plus vraiment à même de les faire. Cela fait notamment partie de ce que l’Ordre estime nécessaire d’observer aujourd’hui de plus près.
En effet, selon ce qu’indique le conseil de l’ordre dans sa partie « motifs d’exemption de garde », les acupuncteurs et homéopathes, n’étant ni des qualifications ni des compétences, ne constituent pas des conditions d’exercice justifiant une exemption de garde même si le demandeur argue d’un exercice exclusif. Le conseil départemental peut accorder un délai au praticien pour actualiser ses connaissances. PDS MEP, ils sont donc invités à actualiser leur connaissance, et adapter leur pratique à la réalisation de la PDS tout en conservant la possibilité de se faire remplacer.
Tarifs
Une cotation supplémentaire pour les homéopathes avait été obtenue par le SML dans la convention de 2005, et a été reconduite depuis : cet article permet à tous les médecins de coter au cours d’une même consultation un acte à tarif opposable et un acte non remboursable. « Cette cotation est beaucoup utilisée par les MEP, tout simplement car ils apportent une expertise particulière, en plus de la consultation »
Les évolutions des différentes conventions médicales sont très pénalisantes pour les homéopathes. Etant beaucoup moins désignés comme médecin traitant, ils ne perçoivent pas les rémunérations forfaitaires liées à ces missions. Or la part forfaitaire est de plus en plus importante dans la rémunération des spécialistes en médecine générale. Les syndicats s’en préoccupent à l’heure actuelle. L’un en suggérant aux médecins homéopathes d’« explorer les niches de la nomenclature et de la convention pour utiliser au mieux les cotations disponibles, par exemple visite longue. Un autre en essayant de négocier des cotations spécifiques du fait que l’expertise particulière représente une vraie plus-value dans le parcours de santé des patients
Bonjour
Bravo pour tout ces articles . Pour ma part is ils confirment un peu ce que je pensais! En tant que médecin homeopatihe
On ne risque que de faire du bien par la parole et on prend pas beaucoup de risque avec des granules.
Prendre sonmédicament à heure fixe et plusieurs fois par jour, cela nous permet de realiser a quel point nous sommes investis dans notre prise en charge thérapeutique . Plus c’est long et mieux sera la guerison . Une amie prend depuis quelques années des granules pour ses bouffées de chaleur sans résultat . Je lui demande pourquoi tu continues ?
Si cela ne ne fait pas de bien , cela ne me fait pas du mal non plus… à ce jour elle avale toujours ses granules.
Vous m’avez éclairer sur leurs conditions d’exercice et cela me conforte un peu plus dans mes conclusions …
Au plaisir de vous lire
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