Qui sont donc les HOMEOPATHES ? (5: homéopathie =placebo?)

Cinquième chapitre du post consacré aux homéopathes.  

Un des grands arguments en faveur de l’homéopathie et surtout de son remboursement serait liée au fait que  la grande valeur de l’homéopathe serait liée à la prescription raisonnée d’effet placebo ?

Le raisonnement est le suivant :

De nombreux partisans de l’homéopathie soulignent, parmi les avantages de cette pratique que :

  • L’homéopathie est un traitement placebo;
  • A ce titre, elle permet de soigner – au pire elle ne fait pas de mal;

Et concluent que cet effet justifie sa diffusion et son remboursement partiel par l’assurance maladie.

S’appuyant sur ces arguments, posons la question suivante:  le placebo étant réputé être une molécule neutre, sans effet indésirable sérieux, si l’homéopathie est un placebo, alors elle est largement utilisée en médecine pour cet effet ? Et donc, la question est la suivante : la  prescription d’homéopathie dépasse t’elle le cadre des médecins homéopathes ?

Pour savoir si la prescription d’homéopathie dépasse le cadre des médecins homéopathes, j’ai trouvé cette intéressante thèse récente : « État des lieux de la prescription d’homéopathie par les médecins généralistes non homéopathes : étude quantitative auprès de 298 médecins généralistes normands » Aurélie Nguyen-Cornuault  lien

L’étude consistait à = établir un état des lieux de la prescription d’homéopathie par les médecins généralistes non homéopathes,

Les résultats :

  • Plus de la moitié des médecins généralistes non homéopathes (59,1%) l’étude déclarent prescrire de l’homéopathie. 36% utilisent l’homéopathie de manière occasionnelle, et 23,1% de manière régulière.
  • 18,5% des médecins généralistes de l’étude ne se sentent pas prescripteurs mais acceptent de renouveler des ordonnances homéopathiques.
  • Au total 77,5% des médecins de l’étude établissent des ordonnances de médicaments homéopathiques.
  • Ces médecins ne se déclarent pas comme homéopathes. L’étude montre qu’ils prescrivent la plupart du temps sans formation. En effet, La majorité (79,5%)  des médecins généralistes de l’étude prescrivant de l’homéopathie n’ont pas reçu de formation dans ce domaine et ils s’appuient surtout sur leurs connaissances personnelles (63,1%) et le renouvellement d’ordonnance (52,3%) pour en prescrire.
  • Ces médecins ne croient pas forcément aux principes homéopathiques.
    • La principale raison de prescription d’homéopathie (68,8%). est la demande du patient
    • Les motivations personnelles des médecins à prescrire de l’homéopathie sont principalement le côté alternatif à l’allopathie : utiliser l’homéopathie plutôt qu’une escalade thérapeutique allopathique pour une situation ne la justifiant pas (71,6%) et de ne pas être toxique avec l’allopathie (68,2%).
  • 7 ans auparavant une étude effectuée en Haute Marne, indiquait que 43% à 50,6% (selon la ville) des médecins généralistes ne se considérant pas comme des homéopathes precrivaient de l’homéopathie (étude des docteurs Céline Macquart-Anselmet et Dorothée Macquart-Cherton en 2000, incluant 173 médecins généralistes, en Haute Marne et 50,6% dans l’agglomération de Reims.

Ce qui est intéressant, outre la motivation de prescription décrite plus haut, c’est la formation de ces médecins exerçant la médecine générale, et ne se disant pas homéopathes.

En effet, à l’heure actuelle, on ne peut pas croire que des médecins oseraient prescrire des médicaments qu’ils ne connaissent pas, et dont ils sont incertains des potentiels effets positifs ou indésirables, sachant que la moindre erreur de prescription faisant courir un risque au patient est judiciairement attaquable. Si tous ces médecins prescrivent de l’homéopathie, il y a 2 hypothèses que nous allons explorer :

  • 1ère hypothèse : ils sont formés à cette thérapeutique

  • 2ème hypothèse : ils ne sont pas formés mais estiment que ni le patient ni eux ne courent aucun danger en prenant de l’homéopathie, puisque c’est une thérapeutique dont le seul effet est placebo.

1ère hypothèse : les généralistes prescrivant de l’homéopathie sont formés à cette thérapeutique

Réponse = non

Sur les 298 médecins interrogés pour la thèse :

  •  38 médecins ont répondu être formés en homéopathie (soit 12.5% des prescripteurs)
    •  25 médecins sur 38 ont eu une formation que l’on peut dire complète (nom d’une formation diplômante, et/ou durée supérieure ou égale à un an mentionné). Pour autant, ces médecins ne sont pas installés comme médecins homéopathes. Parmi ces médecins formés en homéopathie, 2 déclarent ne pas en prescrire. 
    • 6 médecins sur les 38 ont indiqué avoir été formé par un laboratoire B
    • 2 médecins ont répondu avoir eu une formation sur deux jours
    • Toutes les réponses n’étant pas exploitables, le total ne fait pas 35.
  • Tous les autres médecins n’ont reçu aucune formation et même parmi les médecins prescrivant quotidiennement de l’homéopathie. Leurs sources pour prescrire sont:
    • d’abord leurs connaissances personnelles,
    • puis juste pour le renouvellement d’ordonnances,
    • puis les informations d’un représentant de laboratoire (26,1% des prescripteurs ont validé cet item),
    • et enfin le fait d’adresser le patient à un médecin homéopathe.

2ème hypothèse : les généralistes prescrivant de l’homéopathie ne sont pas formés mais, estiment que ni le patient ni eux ne courent aucun danger en prenant de l’homéopathie, puisque c’est une thérapeutique dont le seul effet est placebo.

On a confirmé ci-dessus le faible taux de prescripteurs formés. 12.% seulement des généralistes non homéopathes mais prescripteurs d’homéopathie sont formés, et seulement les 2/3 par un diplôme de typer DU que l’on peut considérer comme complet

Et donc, si tous ces médecins prescrivent tant de l’homéopathie, et ceci sans avoir la formation pour ce faire, cela indique bien qu’ils savent n’avoir aucun risque à le faire, et que pour eux la grande valeur de l’homéopathe est bien que cela leur permet de prescrire sans danger un médicament qu’ils ne connaissent pas et d’être surs que cela ne présente aucun danger pour leurs patients. C’est donc bien de la prescription non dite d’effet placebo ?

L’effet placebo

Les médecins praticiens ne sont pas les seuls à penser l’homéopathie en tant que médecine pour les bien-portants  : L’Académie nationale, société savante reconnue, ayant un rôle de conseil scientifique, a émis des doutes à plusieurs reprises sur l’efficacité de cette discipline. En 1987, à la suite d’une controverse, elle a indiqué que la prescription de médicaments homéopathiques « ne se justifie que dans les manifestations pathologiques guérissant spontanément ».

Une chose est certaine : Le mécanisme d’action de l’homéopathie n’est pas encore expliqué.

Une autre est aussi certaine : de nombreux médecins prescrivent de l’homéopathie sans formation et sans se déclarer homéopathes parce qu’ils savent qu’ils ne font prendre aucun risque à leurs patients. Seulement dans ce cas, l’argument des homéopathes sur le traitement adapté à l’individualité de chaque patient tombe à l’eau. Les généralistes prescrivent pour faire plaisir à leurs patients, ou pour leur faire croire qu’ils vont s’améliorer tout en étant certains de ne leur faire prendre aucun risque, même s’ils prescrivent sans aucune connaissance..

Certains argumentent que la constatation des effets positifs sur les patients constitue un argument d’efficacité suffisant.  Parmi ces partisans, quelques-uns sont convaincus que l’on finira par comprendre le mode d’activité des hautes dilutions et par démontrer la mémoire de l’eau. Ils sont persuadés qu’il faut juste du temps, tout comme il en a fallu pour démontrer des effets d’autres médicaments utilisés sans connaissance physiopathologiques pendant des siècles, tels que l’aspirine.

Le problème de cette caution « effet placebo » c’est que c’est un argument scientifique très fragile.

Et puis c’est aussi que l’effet placebo ne peut pas et ne doit pas devenir la seule caution scientifique de l’homéopathie  lien

Parce qu’à ce titre on serait dans le contexte d’un placebo masqué, et donc loin de la médecine et de la vérité que l’on doit aux patients. Un placebo donné dans le non-dit, et pour ses effets magiques parce que c’est un peu de la magie un truc comme ça: 

  • un placebo constitué de  produits très dilués, donc qui ne peuvent pas être dangereux. Comme ils ne sont pas dangereux, pas besoin  d’autorisation compliquée de mise sur le marché

  • un placebo constitué de produits dilués et sans danger, mais qui agissent quand même.  Le fait que cela agit étant une preuve suffisante de l’action, et n’ayant donc pas besoin d’être prouvé par études en double aveugle.

  • un placebo qui agit seulement en bien, jamais en mal, puisque les produits sont tellement dilués qu’ils ne peuvent pas avoir d’effets secondaires. Et ce serait pour cette raison que des généralistes non formés le donneraient en toute sérénité.

  • un placebo pas toxique, jamais toxique.

  • un  placebo qui soigne exactement là ou cela ne va pas, constitué de molécules téléguidées par une consultation médicale longue et attentive, la chaleur et l’empathie du médecin rendant la prescription plus efficace. 
    • Objection, si vous permettez: il y a pas mal de médecins chaleureux et empathiques qui ne prescrivent jamais d’homéopathie et qui ont néanmoins de beaux succès thérapeutiques avec leurs patients. 

Un commentaire sur “Qui sont donc les HOMEOPATHES ? (5: homéopathie =placebo?)

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  1. Complètement d’accord sur le souci du placebo prescrit dans le non-dit, qui donne un effet magique… et lorsque c’est utilisé pour relativiser le fait de prescrire de l’homéopathie, on se retrouve avec des réactions du type « mais le placebo du coup ça marche vraiment c’est génial », les effets concernés sont assez largement surestimés.

    Au vu de l’ensemble de cette série d’articles qui m’intéresse beaucoup, je m’interroge par contre sur cette phrase :
    « Une chose est certaine : Le mécanisme d’action de l’homéopathie n’est pas encore expliqué. »

    Il me semble que si on suit la petite maxime de la dent d’or, « assurons nous bien du fait avant de nous inquiéter de la cause », l’homéopathie devrait déjà montrer qu’elle a une capacité d’action spécifique, montrer des résultats avant que l’on s’interroge sur les mécanismes qui en seraient à l’origine non ? Or c’est bien cela qui fait défaut aujourd’hui… !

    En revanche, on a de plus en plus de travaux qui explorent ce qu’il est convenu d’appeler « l’effet placebo », en fait une combinaison complexes de différents mécanismes (auxquels se mêle la guérison spontanée), de différents effets contextuels qui en l’état peuvent tout à fait suffire à expliquer ce qui « fonctionne » dans l’homéopathie

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