aidante et malheureuse

Faut au moins qu’il y ait un endroit protégé ou je puisse venir épancher mon ras le bol. Ce sera donc ici.

J’en ai marre de vivre mal accompagnée. Je craque. Je n’en peux plus de ce mari qui n’en est plus un. De cet homme diminué, handicapé, de corps, d’esprit et de coeur.

Mon mari a eu un accident vasculaire cérébral. Il s’en est sorti avec des séquelles que l’on qualifie de modérées. Pratiquement pas de paralysie. Seulement une aphasie….mais une aphasie globale, avec une récupération partielle, mais dont je réalise chaque jour un peu plus la partialité.  Il parle mal… très mal. Le problème, le vrai, le mien, c’est qu’il pense, réfléchit et agit de la même manière qu’il parle: mal, et de moins en moins.

Dans les suites de cet accident, comme il avait 50 ans, une vie professionnelle hyper-active, il est resté un peu sur la lancée de la vie active. Seulement, on s’en éloigne cela fait maintenant 6 ans 1/2 et de plus en plus il sombre dans une inactivité chronique. Et notre couple s’enlise, et se noie dans une incompréhension de plus en plus absolue. Moi qui me crève, je bosse, j’organise tout à la maison, je gère les enfants, leurs études, leurs appart, leurs problèmes, leurs loisirs, et tout pour mon mari, tout l’argent, tout les papiers administratifs de la maison, les loisirs, les sorties, les vacances. Et M. pense faire « plein de choses », mais en pratique, met des heures à se préparer le matin, range la maison en posant à gauche ce qui était à droite, ne prépare pas un diner si j’ai oublié de dire quoi préparer, et quand il décide de faire une chose par lui même fait systématiquement un contresens. Il ne suit pas, ne comprend pas, n’est jamais au courant de rien, ne comprend pas à demi mot, ne devine pas, n’anticipe pas, ne décide pas.

Cette absence de capacité d’organisation et surtout d’anticipation est pratiquement insupportable pour un conjoint inséré dans la vie active. Qui rentre le soir exténué pour trouver une table vide, et un mari qui dit: je ne savais pas ce qu’il fallait faire…

J’en ai assez, par dessus la tête. Dans cet océan, l’amour, qui flanchait déja quand il est tombé malade, s’en est allé. Des 2 côtés. Nous ne nous aimons plus. Il n’y a plus de générosité, plus d’attentions, plus de tendresse. Seulement de l’impatience, de l’insatisfaction.

Je me demande comment tout cela va évoluer. Est ce possible de revenir en arrière, de retrouver 20 années d’amour, car j’ai aimé mon mari plus que tout. Ou est partie cette affection ? Ai je envie de la retrouver. Et lui, je ne crois pas qu’il me porte désormais le moindre amour. Je ne sais plus rien de lui, car désormais, avec sa parole et sa pensée limitée, les échanges sont très reistreints et ne peuvent plus porter sur les sentiments. Je ne sais pas ce qu’il ressent. De la à en déduire hâtivement qu’il ne ressent rien, il y a un petit pas facile que son inertie me fait facilement franchir..

J’en ai assez, j’ai envie de ne plus être dans cette profonde solitude de l’aidant. D’avoir une épaule pour reposer ma peine, pour enfouir mes larmes. Je refoule seulement mes larmes à coup de kilos et de boulot, j’avance dans une vie qui ne me satisfait pas. A chaque instant c’est la même lancinante question: cela peut il durer comme ça ? Je n’ai pas d’option, pour le moment, aucune alternative.

Et accrochée à moi, pesante, envahissante, permanente, cette sensation de ras le bol, cette envie de se libérer de ce carcan.

6 commentaires sur “aidante et malheureuse

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  1. Vos mots, votre solitude me touchent plus que je ne saurais dire. Mon ex-mari est tombé malade une dizaine d’années après notre mariage et alors que notre vie avait pris un tour nouveau et risqué (installation dans son pays d’origine). A la maladie physique, chronique et contraignante, s’ajoutait une pathologie psychiatrique que j’ai mis bien trop longtemps à reconnaitre, à nommer. Je me noyais dans la culpabilité , je croyais ne pas mériter mieux et pendant longtemps , alors qu’il ne m’avait pas laissé d’autre choix que la séparation , j’ai culpabilisé de m’en être sortie , d’avoir une autre chance .Pas vraiment de rapport avec votre histoire mais je connais cette solitude ,la douleur de ne pas reconnaitre celui qu’on a aimé, la certitude qu’il n’y aura rien d’autre que cette vie saccagée, voir se perdre sa vie sans savoir pourquoi :la solidarité malgré tout même quand on n’aime plus , le sens du devoir, l’engagement à rester pour le meilleur et le pire…Pas de conseil à donner , juste vous lire , vous comprendre .

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  2. Que dire ? Si ce n’est apporter un peu de compassion. Quand on croise les gens,quand on partage un peu de leur vie à l’extérieur (je pense par exemple aux collègues que l’on côtoie chaque jour),on ne peut imaginer ce que peuvent vivre les femmes à l’intérieur de leur foyer, et ceci d’autant moins quand elles sont bien insérées socialement.Et quand on côtoie leurs enfants, gentils, équilibrés, personne n’imagine au quotidien les difficultés qu’ont ces femmes pour arriver à les élever; personne ne reconnait leurs mérites quand on est accompagné par un mari présent uniquement physiquement et qui au lieu d’être une aide et un soutien, n’est qu’une charge pour sa femme. ML, je vous admire!

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  3. Votre témoignage m’a touchée ; mon mari et moi sommes aussi passés par des périodes très douloureuses suite à une maladie chronique. Néanmoins je vous encourage à persévérer et à vous tourner vers Dieu qui vous aime chacun. Dans les moments d’épreuve on a tendance à baisser les bras ; si c’est trop dur à porter seul, il est bon aussi de se tourner vers les amis (s’il en reste), vers des professionnels de la santé… C’est vrai que chaque situation est différente et chaque personne la vit différemment, mais je vous encourage à crier à Jésus-Christ qui a compassion de vous et a une solution pour vous. Il est écrit « Déchargez-vous sur Lui de tous vos fardeaux, Il prendra soin de vous ».

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  4. Pourquoi ne pas associer ton mari à des choses simples qu’il peut faire. Tu dis qu’il ne fait pas à manger si tu oublies de lui dire quoi préparer, fait lui une liste des repas de la semaine pour pouvoir rentrer et mettre les pieds sous la table 😉 L’homme qui vit avec toi n’est plus celui que tu as aimé…

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  5. Mon mari n’a pas eu de problème de santé mais il ressemble au vôtre dans l’absence d’anticipation des besoins des autres…Petit à petit, j’ai baissé les bras,je ne l’aime plus mais on vit à côté l’un de l’autre. La solitude je l’ai doublement car je suis immigrée.Donc sans soutien affectif à proximité. La culpabilité de vouloir le quitter est présente et dans le regard de nos enfants c’est l’incompréhension liée à l’égoïsme de leur âge ! Aimer ailleurs me semble une difficulté de plus. Si on se concoctait une petite thalasso pour parler d’autre chose ?

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    1. ça serait une super bonne idée la thalasso, mais va falloir attendre un peu parce que je reviens tout juste de vacances, et faut consacrer quelques moments au travail.. Dommage, et tenez moi compagnie ici avec vos réflexions, on fera un bout de chemin ensemble.

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