Je teste … (à regret)
La maladie
Pour la seconde fois de ma vie
Pas la petite maladie
A chaque fois la vraie maladie
Celle qui risque de te tuer, puis celle qui t’handicape physiquement
J’observe …
Les réactions de mes confrères
Je ne suis surement pas représentative des médecins malades à moi toute seule
Mais dès fois, quand ils s’adressent à toi au moment de tes soucis de santé, tu te demandes pourquoi ils se comportent différemment avec leurs collègues médecins-malades qu’avec les « vrais » patients.
Et surtout, ce que l’on entend, ça fait rarement plaisir, et pas souvent du bien.
Premier acte : le cancer, la maladie qui ne se voit pas
Défaut de la maladie (dans mon cas) : juste une mastectomie… ça ne se voit pas
Enfin, euh, si… un sein en moins, c’est quand même quelque chose qui manque, surtout quand tu te changes dans le vestiaire commun du bloc. Mais personne ne semble remarquer.
Et puis la chirurgie d’exérèse curage, ça te bloque sévère les mouvements de l’épaule pendant un bon moment. On va pas tout de même se pâmer pour une collègue qui a le bras en écharpe..
Des regards rapides passent facilement à côté du vrai problème. Certains croient que tu t’es fait mal à l’épaule. Certains autres savent, mais n’en parlent pas. Ils trouvent que c’est mieux de ne pas évoquer le sujet (dès fois que ça te fasse mal que l’on s’intéresse à ta défaillance de santé ?, dès fois que tu te sentes en infériorité ? )
Et ça donne :
- Ah, bon, tu n’auras pas de rayons, ni de chimio… ce n’est pas si grave, finalement.
- Pas de chimio… tu as vraiment de la chance
- Ah, juste une mastectomie … alors, tu es guérie !
- Il faut pas te plaindre, avec tous les cas hypergraves qu’on voit en RCP de cancéro, toi au moins tu t’en sors bien
- Ah, bon, la reconstruction mammaire c’est douloureux ?
- Ben t’étais encore en vacances, on t’a pas vue depuis un moment
- Pourquoi tu fais de la kiné ? tu sais, le bras ça se rééduque tout seul
- Tiens, aides moi à porter ça ! t’es chiante, tu veux jamais aider à installer le matériel
- J’espère que tu peux prendre quand même l’astreinte
- Je préfère ne pas te demander de tes nouvelles pour ne pas te gêner, de toutes façons, j’ai vu que tu vis ça superbien
- Oui mais moi, je me suis fait une entorse au tennis, qu’est- ce que j’ai mal.
- Bon maintenant c’est du passé tout ça, alors, tu n’y penses même plus (ça c’est la vraie phrase qui tue . Particulièrement quand on te la sort juste au moment où tu viens de prendre le rendez-vous de ta mammo de suivi annuelle, que tu attends les résultats de tes marqueurs, et que tu flippes à mort)
Acte 2 : le problème articulaire de hanche , la maladie qui se voit
On n’est pas dans la gravité du cancer, mais poser le pied devient de plus en plus douloureux quand on est atteint de cette forme rare et rapidement évolutive d’arthrose appelée CDR. Et, cette fois, c’est visible. Des mois à boiter, et maintenant la canne, en attendant l’intervention dans 3 semaines.
Et, là, personne ne peut passer à côté du fait que tu as réellement un problème de santé.
Et ça donne :
- C’est de l’arthrose, tu es sure ? on a bien éliminé une métastase de ton cancer?
- Tu as vraiment l’air d’une handicapée avec ta canne, t’es vraiment obligée de te montrer en spectacle ?
- Franchement, la canne, ça donne pas confiance aux patients
- Tu devrais prendre des anti-inflammatoires (… oui, tous les jours depuis 9 mois)
- Fais gaffe à ton estomac avec les médoc, pour une gastro, ce serait idiot de se choper un ulcère, en plus tu devrais te faire la fibro à toi-même !
- Tu devrais prendre des antalgiques ( … oui, tous les jours depuis 9 mois)
- Tu ne crois pas que tu devrais maigrir (facile, sans activité physique…)
- Tu t’arrêtes combien de temps après ? 2 mois ? ben dis donc ma fille, tu n’exagères pas un peu ?
- Ma belle-mère, son opération a été complètement foirée, elle avait encore plus mal après qu’avant.
- Et après la première hanche, tu vas voir, il y aura l’autre, et puis, vu comme tu marches, tu vas te bousiller les genoux, c’est sûr.
Et si ?
Et si entre médecins,
On était empathique comme avec les patients
Et si quand un collègue ne va pas bien, on ne tirait pas sur l’ambulance
Et si, quand un collègue est malade, il s’entendait dire les mots que l’on dit à un malade « normal »
- Je comprends que c’est dur ce qui t’arrive, j’espère que tu iras vite mieux
- C’est dur de travailler en ayant mal.
- Soignes toi bien et reposes toi, c’est important
- Si tu as besoin d’aide ou de quelque chose, tu peux compter sur moi.
Pourquoi ai-je eu l’impression en lisant votre post que vous parliez de moi ??…. PRENEZ BIEN SOIN DE VOUS ! Et pour une fois je me permets de vous faire des pokoù (= bisous bretons au beurre salé ! c’est vachement mieux que les antidépresseurs et autres benzodiazépines ! si, si…)
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Merci Cathy, hélas, oui, ces expériences pauci-relationnelles sont reproductibles !
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Non, non, quand un médecin est malade , le plus important c’est qu’il prenne ses gardes ! Que surtout sa maladie ne retentisse pas sur les autres. Un médecin malade ok, mais actif comme s’il ne l’était pas. S’il ne se sent pas bien, on lui appuie un peu plus la tête pour qu’il se noie. C’est le principe. Pourquoi ? Plein de bisous
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Trouver un mode humoristique pour dire cette faible solidarité, c’est bien toi, ma chère Fluorette !
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tu as oublié cette réflexion pourrié d’une ancienne copine enrhumée : « suis allée voir X(qui démarrait une chimio) ben je l’ai trouvée plus en forme que moi . Non prends du temps et ne les écoute pas s’ils sont odieux montre leur la porte sans rien dire j’espère que bientôt tu nous donneras de bonnes nouvelles bises amicales
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Réflexion excellente de vérité !! Pour les pas empathiques, non seulement je peux leur montrer la porte, mais dans mon état actuel, je suis même équipée pour leur flanquer un coup de canne !.
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Je veux juste rappeler que le Conseil de l’Ordre dispose d’une commission d’entraide et que celle-ci est justement là pour soutenir moralement et financièrement si besoin les collègues dans le chagrin ! En tant que président du CDOM 92, je veux redonner tout son sens au mot » confrère » : il vous appartient alors de nous informer des ennuis que vous rencontrez et nous sommes , en tant qu’ordinal, une 40aine dans les Hauts de Seine, à être des confrères de proximité à l’écoute et disponibles pour aider nos » confrères » et les soutenir du mieux qu’on peut … C’est le vrai sens de la « confraternité » je vous suggère de vous inscrire sur notre site : cdom92.org… Bon courage et avec mes sentiments les meilleurs
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Je vous remercie de cette intervention. En vrai mon chagrin vient du fait que ma santé est défaillante, mais à part ça tout va assez bien dans la tête. Voyez, j’ai encore une plume alerte, et je n’écrivais pas ce post pour me plaindre, mais pour souligner la faible empathie des médecins entre eux. Votre intervention va dans le sens de ce que je redoute. Elle semble confirmer que pour trouver des confrères aidants et soutenants, c’est redoutable qu’il soit nécessaire de s’inscrire sur un site spécifique. Travaillant dans une grande clinique, je suis entourée de plein de collègues, et heureusement tous ne se comportent pas comme ceux que j’ai décrit dans mon post ! Pour autant, à la suite de ma première chirurgie pour cancer, les réactions des confrères m’ont vraiment amenée à me questionner. De ce fait, je suis allée suivre une formation à l’annonce de maladie grave. Ensuite, j’ai eu plusieurs fois l’occasion de former des médecins à ce sujet, et ai été frappé des difficultés rencontrées par le corps médical dans les situations émotionnelles. Encore merci de votre soutien. Marion
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