Le blues du samedi soir confiné

Ca me prend souvent tard le soir… l’inspiration, une envie d’écrire

Un texte que je mettrai en ligne sur mon blog, et, je le sais, à part quelques inconditionnels qui aiment lire mes écrits (et ont la gentillesse souvent de me le dire), ce sera peu lu, peu relayé dans la presse

Pas forcément parce que je n’ai rien à dire de sensé ou d’intéressant.

Juste parce que nous sommes tous noyés non seulement dans une pandémie qui nous déconcerte et nous dépasse complètement, mais en plus dans un océan d’information duquel il est très difficile, voire impossible de sortir la tête et de nager harmonieusement, quand bien même on voudrait raison garder. Un océan dans lequel chacun a son mot à dire, le dit, n’écoute pas l’avis des autres, et n’a pas le temps de s’arrêter pour réfléchir ou se calmer, tant est grand le flot d’info.

Jusqu’à présent, je pensais qu’il était difficile pour les politiques de maintenir le cap et de gérer cette crise. Mais d’un coup, je me demande, et je ne suis pas la seule, d’où vient cet emballement de changements de caps, d’informations contradictoires, de démagogie mal placée, de démonstration de bordel.

On s’inquiète pour la santé mentale des français. On pourrait s’inquiéter également pour la santé mentale de ceux qui nous gouvernent. Je veux bien que ce soit compliqué, qu’on ne sache pas prédire l’avenir, qu’on n’a pas les connaissances, mais ça ne suffit pas à expliquer l’emballement des informations illogiques et contradictoires, l’absence d’explication claire, les revirements constants, et le lâchage de raison entre l’économie et l’épidémie.

Faut t’il s’étonner que l’épidémie s’emballe, que les gens prennent de moins en moins de précautions. Parce que, quoi qu’en disent certains, les premiers responsables des contaminations, ce sont les humains. Chaque humain qui n’a pas respecté les consignes de précaution, que ce soit au boulot, en famille ou dans le métro, porte sa part de responsabilité dans la transmission et l’extension de cette infection.

Et toutes les mesures qu’on nous impose n’ont qu’un seul objectif : que les rencontres des humains soient moins nombreuses, les interactions moins proches et moins longues, pour que la bestiole ne saute pas de l’un à l’autre.

Toutes ces mesures ont aussi 2 autres objectifs : gagner du temps pendant qu’on augmente l’immunité grâce au vaccin, et protéger le système de prise en charge médicale qui est au bout du rouleau.

Il y a le fond, et la forme. A l’heure actuelle, la forme est déplorable.

On commence par un confinement qui n’en est pas vraiment un. Aujourd’hui donc, les petits commerces ont fermé, tandis que les grandes surfaces pouvaient rouvrir. Au lieu de rentrer à 18 h, il faudra être chez soi à 19, ce qui désengorgera peut-être les entassements dans les magasins d’alimentation. Plein de commerces sont devenus plus essentiels que d’autres. Les coiffeurs (ouf  pour ceux qui se sont fait avoir les 2 premières fois), les libraires, les « disquaires », (ça existe encore ?) , les fleuristes (oui ? non ? ce coup la je ne sais même pas ?), les chocolatiers, parce que Pâques est la semaine prochaine. Un confinement qui pour la large majorité des gens ne consiste qu’à poursuivre leur vie exactement comme les semaines précédentes. Avec une seule différence de taille : un cantonnement dans une sorte de pavillon des infectés, avec l’interdiction de sortir de sa zone. Le temps des pestiférés est revenu.

Les vaccins. Promis, mais pas réaliste. Retards de livraison, explications incohérentes, décisions prises à la va-vite de supprimer l’astra, puis de le remettre seulement après 55 ans, alors même que de nombreux jeunes soignants se sont fait vacciner par ce vaccin, et ne savent pas ce qu’il adviendra de leur rappel. Organisation en pointillé des centres de vaccination, ou de nombreux retraités comme moi se mobilisent, ainsi que de nombreux remplaçants et étudiants, et apprennent fin mars que depuis 3 mois personne n’a encore décidé comment ils allaient être rémunérés pour leur travail. Car 4 heures à voir entre 40 et 80 patients en prévaccination, c’est quand même un vrai boulot. Mais, personne ne veut salarier ces médecins, et il ne peuvent pas recevoir d’honoraires puisqu’ils ne sont pas installés. On est en France. On ne va pas prendre une décision si vite, on va enfiler des perles et faire des réunions à l’infini pour voir qui et par qui et comment toute cette somme de travail qui mérite rémunération (très petite prévue), sera ou non payée un jour.

Et puis les recommandations. A géométrie variable. Un jour on vaccine telle partie de la population, le lendemain on ajoute des facteurs de risque, ensuite on répartit entre les 2 vaccins disponibles, puis on rerépartit puisque l’un devient indisponible chez moins de 55 ans. On se rappelle qu’il n’y a même pas 15 jours, ce fameux même vaccin était interdit chez les plus de 65 ans… Et on voit tout le monde réclamer énergiquement un vaccin à ARN qu’ils redoutaient tous il y a 3 mois parce que c’était « génétique »…

Pour finir sur cette note de pessimisme du samedi soir, parlons des consignes de sortie extérieure. Alors, on vire les gens du bord de la seine, mais on les autorise à s’entasser dans les manif. Logique ? et bientôt ? quand tout le monde sera dehors ? on va interdire de s’asseoir dans l’herbe ? on va obliger à rester debout. Mais pas à courir parce que ça aérosolise ?

Et enfin, les écoles. Tous les pays du monde prouvent que l’école est un haut lieu de contamination. Mais la contamination scolaire a tellement contourné la France, qu’on vient de réautoriser les enfants à faire du sport scolaire en gymnase. Et on n’installe pas de purificateurs d’air, dont l’efficacité est démontrée. Parce que ça a un coût, nous qui avions cru en « quoi qu’il en coûte ». Une logique inaccessible. On ne vaccine pas prioritairement les prof qui pourtant le mériteraient, d’être prioritaires. Mais c’est qu’en fait on n’a pas assez de vaccins… Parce qu’on fait des promesses, mais des vaccins on n’en a pas suffisamment. Et quand on nous en livre, par surprise parce qu’aucun plan de livraison ne semble exister, on fait une belle opération de comm en organisant des grandes séances de vaccination le week-end, que le ministre visite augustement avec sa cour, et auxquelles des motivés comme moi viennent consacrer leur samedi et leur dimanche, sans même savoir si on ne les considère pas comme des bénévoles, comme devraient d’ailleurs être tous les médecins.

Arrêtons-nous un instant chez les généralistes libéraux. Motivés eux aussi pour que la vaccination aille vite. Et aussitôt désenchantés par un rapport totalement déséquilibré entre investissement du médecin/ réalité des vaccins. On y ajoute l’injection impromptue et rapide des pharmaciens dans le circuit vaccinal, parachutés alors même que l’organisation médicale atteint un semblant de mise en place la plus cohérente possible tenant compte des aléas et des imprévus des livraisons des vaccins. OK pour les pharmaciens, et toutes les bonnes volontés piqueuses, mais si c’est pour diviser les rares flacons en 4, à quoi bon procéder de cette manière. Attendre eut été plus prudent et moins clivant.

Terminons par les réas. Simple, on n’a qu’à ouvrir des lits, le ministre l’a encore dit, il y a de la marge. A part que les médecins sont lassés, épuisés, de vivre dans ces établissements devenus lugubres, ou ils ne voient plus les familles de leurs patients, n’ont plus de temps d’échange entre eux, traversent d’un pas pressé des couloirs sans vie donnant sur des portes fermées ou s’entassent les covidés. Il n’y a plus de ressort chez les médecins, ils ont donné bien trop d’énergie, il n’y a plus de ressort chez les infirmières, il n’y a plus de renfort, alors on bouge les pions. On déprogramme et on prend l’infirmière d’orthopédie pour la mettre en réa, comme si du fait de son métier elle savait tout faire. Ensuite on prend une infirmière du bloc déprogrammé, et on la met en service d’orthopédie, alors qu’elle a une formation spécifique bloc et qu’elle a été en salle la dernière fois durant ses études…

C’est mon blues du samedi soir. Un blues certainement partagé par beaucoup, qui ne voyons pas la fin du tunnel, qui avons une impression de jamais vu mais aussi de pire que tout dans la gestion de l’imprévisible. Le blues du confiné, le blues de JP, mon réanimateur préféré et ami que je vois perdre sa joie de vivre et son énergie. Ce n’est pas fini. Il faut tenir, et pour tenir, il faudrait qu’on lise moins de conneries, que l’on fasse plus attention, et que nos politiques comprennent que ce que nous attendons tous, en premier, ce n’est pas qu’ils filent un coup de pied au virus, c’est qu’ils agissent avec cohérence, et cessent de nous prendre pour des pions qui vont digérer sans déprimer et sans s’exprimer leurs changements itératifs de cap et de consignes.

10 commentaires sur “Le blues du samedi soir confiné

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  1. Bonjour,

    enseignante, je ressens exactement la même chose face à la communication gouvernementale.

    Un grand merci pour vos articles, documentés, plein de bon sens que je lis depuis des années. Ils m’ont éclairée sur bien des sujets.

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  2. Même mon clavier me lâche… Je disais donc que la croisière ne s’amusait plus, le navire est en perdition et le commandant de bord , un marin de pacotille, a perdu tout le sens de ses responsabilités. Y-a-t-il encore un chef à la tête de notre pays ?

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    1. On peut le voir comme ça, mais comme disait mon ancienne directrice: avant de virer quelqu’un, toujours penser qu’on peut trouver pire… On peut critiquer mais la vraie question c’est de savoir si d’autres auraient fait mieux.

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  3. Je vis en Belgique et je suis espagnole et je suis l’actualité medicale française aussi et c’est le même scénario par tout avec des heures de couvre feu différents et bar ouverts/ fermés
    En Espagne, la une des journaux, c’est le français qui vont faire la fête à Madrid
    Mes amis médecins à Madrid sont dépités, épuisés et enragés par la politique qui a fait de Madrid un open bar Européen
    Et puis à dans le su très communautés autonomes les gens ne peuvent pas aller visiter ses parents….

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    1. J’ai eu souvent des difficultés à me connecter avec WordPress, je lisais donc sans mettre un « j’aime « . Je commentais avant sur pseudo « coquille d’oeuf »😉, et je me souviens avoir été à l’origine de la citation crier ou chuchoter. J’aime beaucoup vos analyses et le ton de vos articles. Bien cordialement
      Françoise Suret

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      1. Merci beaucoup de ces compliments qui me touchent. Et pour la citation, il me semble que je vous avais répondu à l’époque qu’elle me plaisait beaucoup et que je l’avais mise en exergue dans le blog. Cordialement.

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